08. De la merde en barre

Jerge Brannan © (Texte et musique : Nau Quentin)

Me v’là en mauvaise posture
Ma radio ne marche plus
Je pars donc à l’aventure
Pour régler l’malentendu
Aucun des réparateurs
Ne peut réparer l’objet
Selon un c’est le moteur
D’après l’autre c’est l’tirbouquet
Ils ne font plus le modèle
Obsolète depuis 40 ans
Décidé, j’me mets en selle
J’achète un petit écran

Installé dans mon salon
Je ne cesse de contempler
Ma première télévision
En couleur s’il vous plaît
Tant d’images à la seconde
Des programmes à la pelle
L’ouverture sur le monde
D’un p’tit coup de manivelle
J’ai enfin une télé
Je me suis mis à la page
Je peux enfin regarder
Les nouvelles, les reportages

Quand vient le journal de 20h
J’mets des images sur le son
Je vois le sang et l’horreur
Raz de marée, exécution
Tous les films du dimanche soir
Ont au moins 20 explosions
Du sang et des coups de poignards
Freddy, Halloween, Jason
Je commence à me d’mander
Si j’ai eu une bonne idée
Je cherche un peu de beauté
Je zappe sans rien trouver

Le jour pointe à l’horizon
Je n’ai toujours pas bougé
Devant ma télévision
Je suis comme hypnotisé
Les images ont un pouvoir
Et se collent à mon esprit
Je file quand même au plumard
J’suis vidé, je vous le dis
Je passe la journée entière
A dormir d’un seul œil
Je vois les guerres, les misères,
Les tueurs et les cercueils

Invité, je dois sortir
Je fais à peine quelques pas
La peur vient de m’envahir
Il fait noir loin de chez moi
Je repense au hockeyeur
Qui massacre les habitants
Caché près d’chez mon coiffeur
J’en suis sûr, oui, il m’attend
La silhouette, sur le trottoir,
Me rappelle celle d’un voyou
Vu à la télé hier soir
Celui qui tranche les cous

Rebroussant chemin, je cours
Referme la porte chez moi
Je m’enferme à double tours
Je me glisse sous mon sofa
Le silence se répand
Sous la porte, un trait d’lumière
On s’avance lentement
Une silhouette est là derrière
Une clé se fait entendre
Mon voisin rentre chez lui
Cette histoire me fait comprendre
Que je plongeais dans la folie

Me ressaisissant enfin
Je rallume la lumière
Je m’empare d’un gourdin
Ma télé va prendre cher
Quelques minutes plus tard
Je dépose sur le trottoir
Le cadavre d’ma télé
Bon vent, elle me fout la paix
J’ai racheté une radio
J’ai quand même mes nouvelles
Mais il me reste dans mon cerveau
Des images, des séquelles

Vous qui avez la télé
Repensez à cette histoire
Qu’elle soit ou non inventée
C’est de la grosse merde en barre
Mieux vaut une discussion
Ou une toute petite chanson
Un p’tit dîner entre amis
Plutôt que cette saloperie
C’est un truc à rendre dingue
A vous foutre les miquettes
A sortir tous vos flingues
Ou à devenir tous tapette

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